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INTERVIEW AVEC ALBERT MOXHET, 72 ANS

« L'EPERVIER MOUCHETE » DE LA FEERIE ARDENNAISE 

par Eric LE NOUVEL en Mars 2013

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Ecrivain wallon, « Chercheur en traditions » :

  • L'Ardennais - photos d'Edmond DAUCHOT (Musée en Piconrue, 2012)

  • La sorcellerie en Ardenne (Perron, 1991),

  • Ardenne et Bretagne : les soeurs lointaines (Mardaga, 1989)

(Fait l’objet, en l’été 2013, d’une réédition complètement revue, augmentée, illustrée par une bonne trentaine d’illustrateurs ardennais et bretons. Cette nouvelle version, issue d’un projet européen leader est coéditée par le Musée en Piconrue, à Bastogne, et le Centre de l’Imaginaire Arthurien, à Comper-en-Brocéliande. Préface de Claudine Glot, postface de Pierre Dubois.)

  • etc. (40 ouvrages publiés ou en collaboration)

 

ARDENNE, LA FORET DES LEGENDES OU "LE PAYS OU L'ON N'ARRIVE JAMAIS..."

 

Cher Albert, bonjour

N DSC0191ous nous sommes rencontrés au « Printemps des Légendes 2012 » à Monthermé, et j'ai lu attentivement l'ouvrage collectif « Forêts, vie et mystères en Ardenne et Luxembourg » (Musée en Piconrue, 2010), notamment ta passionnante contribution « Les êtres fantastiques de la forêt ardennaise. »

Tout le monde n'a pas la chance de connaître les Ardennes. On connaît en France le département (08) de la Champagne-Ardenne, surtout grâce au cru à la prestigieuse appellation. Les lettrés savent aussi que c'est la patrie d'Arthur RIMBAUD, dont témoigne son musée à Charleville-Mézières.

Pourquoi disons-nous les Ardennes au pluriel, alors que tu ne parles que de l'Ardenne au singulier ? Les Ardennes s'étendent sur quatre pays : France, Belgique, Allemagne (EIFEL) et Luxembourg (EISLEK).

- Albert MOXHET - A.M : L’Ardenne est d’abord une unité géographique, qui se moque bien des frontières politiques voire linguistiques. J’insiste sur ce que je disais dans « Ardenne, celtisme et légendes » : "Elle est une entité géographique, bien sûr, mais aussi morale, qui s’accommode mal du pluriel, qui en fait une zone touristique ou un département, ce qui est terriblement réducteur par rapport à la grande Ardenne que nous vivons et rêvons."

« ARDENNE : Une des plus vastes provinces du Royaume franc, attestée pour la première fois en 767-68, au début du règne de  DSC0195Charlemagne, et s'étendant approximativement des portes d'Aix-la-Chapelle à Sedan dans un sens, et de Hotton à Prüm dans l'autre. » (in "L'Ardenne des 4 Fils AYMON" par JL DUVIVIER DE FORTEMPS - Weyrich, 2008.)

Rappelons à nos lecteurs que c'est Jules CESAR qui dans La guerre des Gaules mentionne l'Arduinna Silva (la Forêt ardennaise), d'après le mot celte d'arduinna, la divinité féminine de ce vaste territoire.

C'est là où mon héros Féeric intervient pour nous aider à définir le Code de ce Lieu, en lui ôtant les voyelles, ce qui nous donne en simples consonnes : R-D-NN, soit : Resch - Dalet - Noun/Noun = principe - porte - tradition sur tradition, soit le principe du passage vers la tradition cachée. Nous reviendrons sur ce point essentiel.

 dsc0027La face extérieure de l'Ardenne est l'obscur de sa grande forêt cachant en son sein la marginalité de l'histoire : « c'est là que vivaient les proscrits, les fous, les amants, les brigands, les ermites, les saints, les lépreux, les maquisards, les fugitifs, les inadaptés, les persécutés, les hommes sauvages... » (in Forêts : Essai sur l'imaginaire occidental, R. HARRISON - Flammarion, 1992). Rajoutons les résistants de la dernière guerre à cette longue liste.

Notre sujet commun de prédilection, relevant des forces de l'inconscient et de l'âme d'un peuple et de sa terre à travers l'histoire, concerne les mystères, les mythes et les légendes.

Ce qui nous fait dire en un cri immémorial : Ardenne, la Forêt des Légendes ! concept forgé dans le creuset alchimique des mythologies celtes, gréco-romaines, et germano-nordiques. C'est le socle de la féerie européenne en émergence, lézardant la fondation catholique de notre civilisation, dans un juste retour cyclique aux origines européennes, et indo-européennes. Car rejoignant ce que tu appelles justement « le fonds commun de l'Humanité, » (in Le Peuple féerique en Avril 2009) en y apportant un souffle nouveau.

Parlons maintenant d'Albert MOXHET, avant de lui laisser la parole.

Féeric dirait que comme tu es né le 2/11/40 à Verviers (Belgique), ton chemin de vie est 9/18. Cette inclusion (nombre 18) est en kabbale celle de la la Vie (Haya), donc Dieu.

La section de la Torah qui te correspond est NOAH, dont l'Arche nous ramène à la dernière onto-logie, et à l'origine présumée de la féerie (voir plus loin dans l'interview).

De plus, MOXHET : M-Q-S-H-T : Mem - Qof - Shin - Hé -Tav = matrice - leadership - feu - souffle - finalité : quelle combinaison !

- A. M : En wallon, mohet, moxhet (le x ne se prononce pas) signifie émouchet, épervier moucheté.

D'accord, revoyons notre copie. Partons sur MOHET : M - H - T : Mem - Hé - Tav = le souffle total de la création, la vision globale, la maîtrise du sujet. C'est plus juste, n'est-ce pas ?.

- A. M : Cela colle assez bien.

Aussi, nous te reconnaissons comme « Epervier moucheté de la féerie ardennaise », puisque tu es spécialiste reconnu du légendaire et de la sorcellerie wallonne. Et grâce à ton degré d'âme, le curieux et sympathique oiseau que tu es, a bien cette vision globale et précise pour fouiller le sol ardennais et y trouver les traditions. D'ailleurs, à 72 ans, tes traits ne dissimulent plus l'animal de pouvoir qui t'habite...Tes amis amérindiens ne diraient pas le contraire.

 dsc0202A travers toi et dans ta maison remplie de livres et de souvenirs, je revois mes professeurs de lettres françaises, et gréco-latines, en ce temps pas si lointain où à l'école, savoir rimait avec connaissance, à travers leurs personnalités.

La tradition indique aussi que derrière un grand homme se cache souvent une femme, non moins élevée, dans l'ancien principe lune-soleil.

Je t'avais rencontré avec ta charmante épouse, Anne, en 2012. Elle vient malheureusement de te quitter à 65 ans. Nous partageons ta peine. Les hommes du passage, dont nous faisons partie, vivent cette épreuve avec une acuité particulière.

Et pouvons-nous, parole de Celtes, lui rendre hommage en commençant cet entretien ?

-     - A. M : Anne était profondément artiste, dessinatrice, etc. Elle avait aussi avec les gens un sens du contact absolument fabuleux. C'était quelqu'un essentiellement positif. Elle ne voyait pas le mal chez les gens. Elle n'avait aucune notion de la rancœur, de la jalousie...

      C'était quelqu'un d'extrêmement ouvert. Nous formions une équipe assez remarquable, chacun avec sa personnalité, nous arrivions à faire des choses assez ouvertes sur le monde . Ses réalisations ont mis en contact des générations, des gens de cultures différentes, dans un sens artistique et extrêmement humain. Elle allait avoir 65 ans. Nous étions de la même région.

 

QUESTIONS

Les Ardennes, la Forêt ardennaise : un concept commun à la France, la Belgique, l'Allemagne et au Luxembourg. Est-ce toujours le cas ?

Quelles différences par pays ?

Quelles perspectives dans l'avenir ?

Pourrait-il y avoir un logo, une image de marque unique et commune ?

- A. M : « En Ardenne, le mouvement de sauvetage de ce patrimoine a longtemps relevé de démarches parfois désespérées d’une minorité DSC0211 persuadée cependant que beaucoup de gens n’attendaient que l’occasion de pouvoir aller à la rencontre de leurs origines. En Belgique, la mention Ardenne jouit maintenant d’une connotation positive – y compris sa traduction en néerlandais et en allemand, Ardennen - notamment en ce qui concerne les valeurs de terroir, du tourisme et de la gastronomie.

Pour diverses raisons d’ordre économique et politique, l’Ardenne française (au singulier, car il ne s’agit pas ici du Département) a souffert durant des décennies d’un manque de visibilité qui semble heureusement s’atténuer grâce à la volonté pugnace d’une poignée d’artistes, d’écrivains et d’enseignants convaincus de la valeur d’un patrimoine exprimé dans des légendes et traditions trop longtemps maintenues sous le boisseau. » (Extrait de l’introduction de « Ardenne et Bretagne, les sœurs lointaines », éd. 2013)

La répartition géographique de l'Ardenne par pays est la suivante : France (20%), Belgique (60%), Luxembourg (5%), et Allemagne (15%).

   Le con   Le concept d'Ardenne a littéralement « accouché » dans la deuxième moitié du 19° siècle au niveau de la conscience collective. Les collectages de cette époque-là ont été véritablement le point de départ. On s'est rendu compte qu'il y avait là une certaine culture, orale. Il a fallu des gens comme Marcellin LAGARDE, qui ont trituré parfois méchamment, si je puis dire, les légendes, les thèmes. Ils avaient un style qui plaisait à l'époque. Ils ont récolté des thèmes, ils les ont mis en forme. Les gens ont réalisé alors que ce qu'ils lisaient finalement venait de l'oral, jusqu'alors bien moins considéré que l'écrit, qui était roi.

C'est là     fuite4filsaymonC'est là le grand basculement qui s'est fait parfois avec de gros défauts, parce que malheureusement pour ce qui concerne l'Ardenne belge en tout cas, toute une série de chercheurs a rejeté tout ce qui n'avait pas pour eux de fondement historique. On a perdu à cause de cela énormément de choses, que ce soit sur le thème du Petit Peuple. Alors que dans d'autres régions (Bretagne, Tyrol), il y a eu beaucoup moins d'ostracisme sur la tradition orale. Donc, il y a eu ce côté historiciste qui a fait du tort par son refoulement.

   On a p   On a parfois raccroché à l'héritage celte, en ignorant ce qu'il était réellement. Il y a eu l'apparition de la celtomanie. C'est un fait. Mais aujourd'hui on en est arrivé à des choses beaucoup plus exactes, parce que les recherches sur le monde celtique ont quand même énormément progressé, notamment dans la seconde moitié du 20° siècle.

Le myth    Le mythe fondateur des 4 Fils AYMON représente le mieux l'Ardenne, et aussi le sanglier, notre animal symbolique. dsc0030 

Quant à un logo commun à toute l'Ardenne, pourquoi pas, c'est à proposer aux décideurs.

Après tout, les 4 Chevaliers sur le Cheval BAYARD, n'est-ce pas aussi une métaphore des 4 pays limitrophes unis dans la même culture ?

- A.M : Cette légende n'a pas imprégné le Grand Duché du Luxembourg ; on la connait mais sans plus. Quant à l'Allemagne, ce sont souvent des souvenirs colportés par l'école, même si Cologne (Köln) est un site aymonien, puisque RENAUD a travaillé à la construction de la Cathédrale et y est mort.

 

  1. Y a-t-il un lien avec Schwartzwald, la Forêt Noire proche ?

Goethe, les Romantiques allemands, appelaient la Forêt die Wald, et non pas der Wald. En la féminisant, ils manifestaient ainsi son caractère sacré, son lien avec l'âme féminine du monde...

- Sur le plan des thèmes de l'imaginaire, avec l'Alsace c'est assez proche, avec la Forêt Noire, peut-être moins, parce qu'il y a moins de contacts officiels. Au départ, les langues n'étaient pas communes, même si la langue véhiculaire était le latin. C’est pourquoi d'ailleurs j'ai parlé de l'Ardenne avec la Bretagne, et non avec l'Alsace, parce qu'elles m'apparaissaient dans la même ligne. Par contre, qu'il y ait des similitudes et des contacts avec l'Alsace, c'est bien sûr.

 

  1. Les symboles, les êtres fantastiques en Ardenne sont pléthore : il n'y a pas là de fumée sans feu.

 dsc0193En vrac : Arduinna, Diane, Saint Hubert, et le cerf blanc crucifère, etc. dans le haut du panier... Le Diable, porteur de mort, les sorcières du sabbat,...Le Loup-garou, etc.

- A.M : La Bête de Staneux (un thème extrêmement riche), le Verbouc, la Chèvre Rouge, le Serpent du Many (la seule représentation de la Vouivre dans le Nord de l'Ardenne)…

Le Petit Peuple : les Nutons, les fées, Mélusine en son château de Reinhardstein (Robertville), « un bon lutin dans une ferme est un trésor », etc.

En gros, une force paganique intemporelle, à différents degrés, lien entre le visible et l'invisible, la vie et la mort. Tu as passé partie de ton existence à nous les faire connaître.

- A. M : J'ai écrit un livre qui n'est pas encore publié sur le Petit Peuple de Wallonie et d'Ardenne.

Ce qui est important, c'est de se rendre compte qu'il y a ce Petit Peuple, nommé différemment d'une région à l'autre, qu'il y a eu une société parallèle, dont on retrouve exactement le schéma en Afrique avec les Pygmées. Ce sont des gens avec leur propre culture, leur propre savoir, remarquables dans différents domaines. Ils ont été victimes du mépris de la différence. Finalement, ce phénomène reste très actuel.

Au début, tout se passe bien. Mais qu'il y ait de la jalousie, ou une question d'intérêt, etc., ils deviennent des gêneurs, on essaye de les éliminer. C'est ce qu'on trouve dans nos sociétés actuelles, avec les immigrés.

Il y a des contacts qui se font, et on se rend mutuellement des services. Mais à partir du moment où cela devient une gêne pour certains, matérielle ou fondée sur la rumeur, peu importe. Alors là, évidemment, c'est le mépris, l'exclusion.

Pour le Petit Peuple, il faut bien comprendre qu'en Ardenne il y a des zones où l'on trouve des Nutons, le Petit Peuple. Ce sont des zones où, sauf exception, il n'y a pas de fées. Et réciproque-ment. Mais pas les deux à la fois. Sauf à la bordure, où tantôt l'histoire se rapporte soit à un Nuton, soit à une Fée. On a exactement la même histoire. Sinon, ce sont des territoires qui s'excluent, parce que finalement, ce sont les mêmes types d'êtres. D'un côté masculin, de l'autre plus matriarcal, le domaine des fées. Ils ont les mêmes pouvoirs, en gros les mêmes caractéristiques.

Par contre, aujourd'hui, on met des fées partout, surtout dans les livres destinés aux petits enfants. Il y a la même contamination au  dsc0185niveau des sorcières. Une transposition erronée au niveau de l'Ardenne principalement. Même Jean-Claude SERVAIS, un artiste que j'admire beaucoup. Ses fées ne sont pas véritablement les fées ardennaises, qui sont de petites bonnes femmes vêtues aux couleurs de l'automne, par exemple.

Mais, dis-nous, aujourd'hui, si on aborde l'Ardenne frontalement, sans utiliser son code chimérique, que se passe-t-il ? Si je me promène, toutes antennes dehors, dans l'Arduinna Silva, qu'est-ce que je vais entendre, en faisant un break sur l'existant ?

N'est-ce pas là la condition du renouvellement en chaînant avec le passé ? Peux-t-on arrêter de dupliquer, et mal, faire du copié/collé, etc ? Les nouvelles générations « n'impriment plus » dans le vrai sens du terme tout ce que nous avons absorbé. Peux-t-on être « ici et maintenant » en Ardenne ?

Y a-t-il toujours, pour paraphraser Gérard de NERVAL dans les premières lignes d'AURELIA, un épanchement du songe (ardennais) dans la vie réelle, et dans la création littéraire et artistique, autre que le courant que tu représentes ?

- A.M : Nous avons un grand nombre d’artistes de diverses disciplines, tels René HAUSMAN - inscrivant son œuvre dans une féerie plus générale, et feu Didier COMÈS - qui a très bien saisi tout ce qui était terroir, etc. - tous deux remarquables.

En féerie ardennaise belge : aussi Jean-Claude SERVAIS, avec un livre illustré sur la Tchalette, une sorcière du 19° siècle, près de Mogimont, proche de la vallée de la Semois. Mais le territoire de JC Servais, c’est plutôt la Gaume.

En féerie ardennaise française : le célèbre Pierre DUBOIS, Hervé GOURDET, tous deux de Monthermé (08).

Pour les écrivains, citons Jean-Luc DUVIVIER de FORTEMPS ; mais pour les romans proprement ardennais, Bernard GHEUR, Armel JOB, etc.

Pour la peinture, Désiré LOUETTE, qui ressent fortement sa région qu'il a traversée toute sa vie et qui a exprimé vraiment des réalités ardennaises profondément ressenties, ce qui est assez remar-quable. Le territoire est son inspiration. Il a fait son chemin personnel en passant par le fantastique, et qui débouche même sur une sorte d'abstraction.

En musique, nous avons : Pirly ZURSTRASSEN, Steve HOUBEN, issus du terroir, et qui ont produit des œuvres contemporaines très intéressantes...

 dsc0047L'Ardenne inspire encore aujourd'hui, mais seulement je crois qu'il faut quand même bien faire ressentir ce qu'est réellement l'Ardenne. Sinon, on est très vite dans une voie un peu déviante.

Nous ne pouvons tourner la page sans mentionner Arthur RIMBAUD, le digne fils de l'Ardenne. Est-ce par hasard s'il était issu de ce Lieu ? Le professeur que tu es toujours a sûrement une idée sur la question. Dis-la nous en quelques mots.

- A.M : Ici, il faut peut-être invoquer le hasard et la nécessité. Rimbaud est né en Ardenne, mais son père était du Jura. Ardennaise, sa mère fut l'une des raisons de ses fugues sinon de ses exils. Mais il revint à diverses reprises se soigner, se reposer ou même passer l’hiver en Ardenne. Il a fustigé le conformisme rencontré à Charleville, mais il semble que l’Ardenne le rappelait comme un aimant attire un morceau de fer. Sans doute cette attraction est-elle sous-jacente dans sa poésie au point de revenir dans le souvenir de "la flache noire et froide" du Bateau ivre. Paul Verlaine, quant à lui, se souvient avec émotion de son ascendance ardennaise :"Au pays de mon père on voit des bois sans nombre/ Là des loups font parfois luire leurs yeux dans l’ombre/ Et la myrtille est noire au pied du chêne vert."

 

  1. Maurice BARRES disait : « Il est des lieux où souffle l'esprit ».

 dsc0257Ici, point de Colline de Sion. Tu seras d'accord avec la devise de Féeric : « un dieu réside en chaque lieu... » Tout vient du sol ? N'y a-t-il pas là en Ardenne une force qui produit tout cet imaginaire ?

- A.M : Là, j'ai un témoignage étonnant d'un Indien d'Amazonie, José GUALINGA, le président des Indiens Kichwas de Sarayaku, dans l'Est de l'Equateur. Son père est un chaman, absolument remarquable, d'une sagesse étonnante, que j'ai rencontré. Dans les années 90, José représentait une Communauté des Indiens d'Amazonie (le Pastaza), et était observateur aux Communautés européennes à Bruxelles. Il a visité l'Ardenne avec un réalisateur de la RTBF, Jacques DOCHAMPS, et il a déclaré à plusieurs endroits : « C'est une forêt-jardin par rapport à la nôtre, amazonienne, mais je ressens quand même des choses dans le sol. » C'est remarquable, il parlait-là de la terre-mère.

Quels lieux initiatiques, vibrant ici et maintenant, recommandes-tu pour le parcours ?

- A.M : Franchimont (Theux), les forêts, les Hautes Fagnes, des lieux peu accessibles comme certains trous de Sotês, Rochehaut, divers sites aymoniens, les grands rochers des vallées de l’Ourthe et de la Meuse, …

Le Château de Reinhardstein est un lieu reconstruit à partir des pierres retrouvées dans le fond de la vallée, et qui fait château de contes de fées dans le meilleur sens du terme. Il a énormément de cachet, même s'il n'est pas d'époque, mais est reproduit à l'identique.

Le Château de Franchimont, tout proche, ne sera pas reconstruit comme avant, parce que les données actuelles de l'archéologie font que l'on ne reconstitue plus à l'identique, mais que l'on adapte éventuellement. On le maintient ici tel quel de façon remarquable.

Ce sont des lieux étonnants, où souffle peut-être effectivement l'esprit. Mais pas autant que dans ces deux endroits où j'ai vraiment ressenti des vibrations : au centre du labyrinthe de la Cathédrale de Chartres, et dans un site amérindien du Nouveau Mexique, à Betatakin, dans le Navajo National Monument, en Arizona, un ancien village dans la falaise, sous une arche de 140 m de haut. J'y ai ressenti des vibrations d'une intensité comparable. C'est étonnant.

Quant à l'Ardenne, je ne sais pas si on peut retrouver çà, mais si j'en crois José GUALINGUA, comme nous en avons déjà parlé, il a ressenti des choses fortes, là où il y a encore des présences.

Pour les 4 Fils AYMON, est-ce la légende qui a « contaminé » les lieux, ou l'inverse ?

 dsc0207- A.M : Prenons le cas des nombreux Pas Bayard présents en Ardenne, ce qui explique aussi le fantastique. Les gens voyaient une pierre avec un trou dedans en haut d'une vallée ; il faut toujours que l'esprit humain ait une explication, une réponse aux questions qu'il se pose. On connaissait le cheval Bayard, qui faisait des bonds fantastiques, il a pris appui là pour franchir d’un bond la vallée,...

Comme près du Mont saint Michel, l'Archange en lutte avec Lucifer a laissé son empreinte sur le Mont Dol...

- A.M : Tu trouves ainsi des Pas Bayard en Ardenne et dans d'autres lieux, comme sur le chemin de Saint-Jacques de Compostelle, on explique que Roland a fait ceci et cela...Et ne parlons pas du nombre d'endroits où Napoléon a dormi !

 

5) « Le pays où l'on arrive jamais »

Ce livre beau et attachant d'André DHOTEL, et qui avait marqué mon adolescence, campe son histoire dans les Ardennes, et je l'avais oublié ! Aujourd'hui, ce titre énigmatique prend ici un éclairage singulier.

Pourquoi, Ardenne, « le pays où l'on arrive jamais « ? Sûrement à cause de la quête permanente de l'inconnu, de soi-même du Graal, que sais-je ?!

- A.M : «  L’Ardenne, c’est un peu plus loin … » C'est marrant, tout simplement à l'époque où l'Ardenne et les Ardennais étaient considérés comme plutôt arriérés, quand quelqu'un arrivait dans un village, et demandait si c'était l'Ardenne, on lui répondait, « c'est un peu plus loin... »!

Au rythme des saisons, et des âges de la vie, il est bon de tourner les pages du Livre de cette région exceptionnelle à plus d'un titre. Car on n'en voit pas le bout. C'est là où il n'y a pas de fumée sans feu, et que l'arbre des symboles ne peut cacher la Forêt de la Connaissance. Ce que nous allons aborder plus loin.

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N'est-ce pas là aussi une allusion au « principe du passage vers la tradition cachée » que nous avons défini au début ? Qu'en pense...l'Epervier moucheté ?

- A.M : Oui, bien sûr, « le pays où l'on n'arrive jamais », la quête permanente. Et, l'intérêt de la Quête, c'est la Quête elle-même. A partir du moment où tu as le trésor, cela n'a plus d'intérêt.

 

6) ARDENNE : le principe du passage vers la Tradition cachée.

 dsc0035La Tradition cachée est présente dans la dialectique ombre-lumière qu'indique massivement l'Ardenne, ainsi que son Panthéon païen, rejoignant un jour le Dieu unique dans une savante cohabitation, lisible prioritairement par les locaux.

Il est fascinant de contempler dans l'histoire spirituelle et religieuse de l'Ardenne l'évolution des archétypes tutélaires : Arduinna, Epona, Diane, Mercure, Silvanus, Artio, Intarabus (…), jusqu'à Saint Hubert et sa conversion devant le Cerf blanc crucifère.

Ce qui nous renvoie aussi au Cerf blanc de l'Eglise de Tréhorenteuc de l'abbé GILLARD en Brocéliande. Mais, le face à face Ardenne-Bretagne n'a plus de secrets pour toi. Tu nous en a déjà parlé.

- A. M : Oui, le Cerf blanc a plusieurs interprétations, parfois Merlin se transforme en Cerf blanc. Il est aussi une image du Christ. Et selon certaines versions, le Cerf qui a converti Hubert était blanc.

 DSC0240Cet animal-guide, vecteur de révélation, marque la complicité totale avec le vivant. « Ici, la forêt toute entière semble s'être convertie elle-même au christianisme, comme l'observe le grand historien de l'art Marcel BRION. Elle a pu triompher d'Hubert, le chasseur païen. » (in Forêts, ouvrage collectif précité de JM DOUCET.)

Nous sommes là dans un processus fondamental de la psyché humaine, que JUNG appelle le processus d'individuation, et dont les religions essayent d'en prendre l'exclusivité sous le terme de conversion. Conversion à Dieu, certes, mais surtout à nous-même, à la grande Vie (Haya) qui nous habite. D'ailleurs de ce point de vue, il n'y a pas d'athées, puisque nous sommes tous bien « vivants. »

- A.M : Il y a toute une série de choses qui sont devenues banales, ou considérées même comme un peu fantaisistes, mais qui relèvent vraiment d'une tradition cachée. Je pense notamment à ces moments de la Toussaint, qui relèvent de l'ancienne fête de Samaïn, et même ici dans la région liégeoise en quelque sorte, on considérait qu'à ce moment-là, il fallait faire fort attention pour ne pas écraser les âmes qui étaient extrêmement nombreuses, au point qu'elles étaient comme des têtes d'épingles sur une branche.

On retrouve la même tradition en Bretagne, où il fallait faire attention de ne pas claquer les portes, parce que cela pouvait blesser les âmes DSC0205 qui passaient. Ce sont des éléments qui sont devenus extrêmement populaires, rentrés dans les usages, et qui remontent finalement très loin.

Référons-nous à nouveau à André DHOTEL dans Terre de Mémoire :

« Il faudrait des pages et des pages de description pour finir par la déclarer indescriptible cette forêt. Je ne vous donnerai qu'un petit détail. A certaines heures, un peu en deçà de la lisière, à la limite de l'ombre des profondeurs et de la lumière déjà oubliée du ciel, il arrive qu'on écoute. Il arrive aussi qu'il n'y ait pas le moindre vent à cette seconde. Alors c'est un silence qui ne se définit nullement par une absence totale de bruit. Car il y a soudain, en même temps, l'espace de la forêt (dont une faible part est seule visible) qui soudain se révèle tout entier. D'incalculables dimensions s'établis-sent. Un autre silence, un autre lieu de même qu'il y a une autre lumière. »

- A.M : Cf. encore le témoignage de José GUALINGA.

Tout ceci nous rappelle le Psaume 36, 10 : « à Ta lumière, Seigneur, nous voyons le jour », ou même la sourate 24 du Coran, Nûr an Nûr : « Dieu est Lumière sur Lumière. »

 DSC0215De même, la Kabbale indique qu'une certaine qualité de Lumière, d'ordre ontologique, est cachée dans l'obscurité. Comme une certaine Lumière, l'essence de Dieu, était présente avant la Création du monde. La tradition alchimique indique aussi que l'ombre n'est que de la lumière qui n'est pas encore advenue.

L'évolution logique est de passer de l'ombre à la lumière, des forces de l'inconscient au Verbe créateur, du paganisme au Fils de Dieu, sans rien renier. En résumé, on ouvre l'obscur de la forêt ardennaise, et intérieure, pour laisser passer la lumière. Sublime faisceau traversant la Forêt-Cathédrale. « Trouée héroïque » de Bastogne. Mais aussi, percée essentielle de l'être. Processus salvateur de transmutation et de rédemption collective.

Comme en cette période de Pessah, la Pâque juive, commémorant la libération des Hébreux d'Egypte, la Matrice d'Ombre, par l'ouverture de la Mer des Joncs. Vers la Lumière.

Dans cette longue tribulation humaine, la féerie est une pièce maîtresse, témoignant de la densité du mystère, et du principe spirituel des Maîtres du Lieu, et du savant Principe : « Dieu est le Lieu. » C'est dire si ce genre littéraire et artistique ne peut être réduit. A lui aussi ne pas s'enfermer dans la forme en négligeant le fond, l'immense puzzle auquel il appartient. Nous en reparlerons.

Ainsi, les calvaires et autres maîtres-autels disséminés dans la forêt ardennaise marquent la vérité locale indicible. La Forêt vous  DSC0249transformera, vous les simples promeneurs, comme la civilisation de passage, nous tous, que fugaces moments d'histoire.

L'Arduinna Silva est aussi désert, propice au sanctuaire spirituel. En hébreu, DABAR est la racine commune aux mots parole et désert. En effet, la Parole de Dieu a été donnée aux hommes dans le désert du Sinaï.

Ainsi, en Ardenne, les Ermites deviennent passeurs d'âmes. Ailleurs, dans le Passais, aux confins de l'Orne, de la Mayenne, et de la Manche, la vie de saint Frambourg, un autre ermite, s'était calquée sur le mythe de Lancelot du Lac. De fait, Ardenne et Passais sont deux carrefours du voyage extérieur et initiatique.

La Bretagne et l'Ardenne : deux hauts-lieux exceptionnels unis par l'équidensité de la nature dans l'équation royale Arthur-Charlemagne, et de son retour caché, l'enjeu spirituel majeur inscrit dans « le monde à venir. »

Voir, in www.feeric-lieuxmagiques.com, Breizh-Bereshit : la Kabbale de Bretagne (Emmanuel LEVYNE)

Quid du renouveau érémitique en Ardenne, la dernière frontière ?

- A.M : Je ne le ressens pas comme cela. Il est mineur, et exclusif au courant catholique.

 

)         7. Le retour du Roi.

A ce stade de discussion, le lecteur avisé aura compris qu'en Ardenne la Quête du Graal cohabite avec la Walpurgis Nacht, comme la messe avec le sabbat, etc. Mais l'histoire des 4 Frères AYMON, avec Charlemagne et l'Epée Flamberge, Maugis et Oriande,...- inscrite dans l'histoire et les paysages, principalement de la France et de la Belgique, met l'enjeu symbolique beaucoup plus haut qu'on ne le croit.

Dans notre concept Féeric précité, (in La France féerique / La mission de Féeric), Viviane, la mère de Féeric en Brocéliande annonce la dislocation future de l'Europe actuelle, car les lois financières du marché ne peuvent anéantir les anciennes cultures. Il ne resterait à terme que l'ancienne Europe de Charlemagne, à savoir la fondation franco-allemande, le Bénélux, la Suisse, l'Autriche, et le Nord de l'Italie...

Elle rajoute pêle-mêle que le Roi reviendra en Europe, tel l'archétype récurrent de Charlemagne, issu de la « 13° Tribu » celto-juive cachée. Il retrouvera l'énergie fugéenne de l'Epée cachée dans le Vercors, ainsi que le Bouclier dissimulé en Ardenne. Car Dagobert II, Roi mérovingien fut assassiné au 7° siècle en forêt de Woëvre, près de Stenay (08), où son corps fut enseveli dans la Basilique Saint-Rémi...Ouf !

Tout ceci nous relie à une ancienne tradition ésotérique prophétisant le Retour du Grand Monarque, de la contre-initiation, de la lutte contre l'AntéChrist, etc. dans une perspective eschatologique, jusqu'au retour du vrai Roi, qui restaurera l'ordre. Sans oublier la figure récurrente du Christ-Roi.

Notre thèse est que si le mythe arthurien perdure, c'est qu'en fait que la figure du Roi Arthur dissimule celle du Roi Charlemagne. Et il n'y a plus qu'un pas à franchir puisque tu attestes qu'Ardenne et Bretagne sont des « soeurs lointaines. » c'est le moment de rebondir sur ce sujet passionnant.

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Autre clé, le Graal. L'Universitaire Yona DUREAU nous en donne une clé majeure d'interprétation, liée à la Royauté sur Terre et au Ciel.

cf. www.alliancefr.com : « Le mythe du Graal, des origines aux temps nazis... »

« La légende du Graal se fonde sur une problématique très significative pour un hébraïsant. Le roi a péché, et son péché a déséquilibré le monde d'en bas en déséquilibrant le monde d'en haut, puisqu'il représente l'ordre supérieur par sa propre hiérarchie sur terre. pour "réparer" cet ordre perdu, et devant le trône vide où le roi ne siège plus, ce trône qui est aussi appelé le siège interdit, il faut retrouver le Graal, le kos, qui permettra la réinstauration du kis, du siège de la royauté divine sur le monde, et rétablira ainsi l'équilibre cosmique.

En termes juifs, la royauté divine, la Shekhina (Présence divine) a quitté le monde qui en est déséquilibré, et il faut réparer le monde par des actes de prières, par le kos, pour rétablir le kis. »

Alors, quid du Graal et de la Table Ronde en Ardenne ?

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- A.M : Je pense effectivement qu'il y a une nécessité de se recentrer. Le problème est qu’actuelle-ment, on part dans tous les sens à la fois, en se laissant formater. Il y a une conscience qui se fait progressivement, je le remarque en discutant avec pas mal de gens, une conscience que vraiment quelque chose doit changer, sinon on va droit dans le mur. Les valeurs sur lesquelles notre civili-sation s'est fondée, il serait temps de les retrouver, peut-être avec une ouverture plus grande qu'auparavant. On a besoin maintenant de revenir à des fondamentaux permettant aux gens d'avoir leurs repères. Sans eux, le monde devient fou.

Quant à l'avenir de l'Europe à terme, pour que l'avenir soit positif, il faut que l'on puisse se séparer de ce souci de rentabilité financière à tout crin, qui est en train vraiment de ruiner toute la civilisation, et plus même, le monde, puisque cela touche aussi le tiers-monde exploité. C'est honteux.

L'Europe actuelle permet d'éviter les conflits. Avant, c'était une poudrière permanente. Mais là, il ne faudrait pas que la poudre rentre par la finance. Car on ne tient pas compte des difficultés d'existence d'une grande partie de la population, simplement parce qu'on se borne à des principes financiers, de rentabilité.

D’autre part, nous allons vers une Europe des régions, dans un sens positif, et non pas égocentrique. C'est par les régions que les gens raisonnent et vivent. Quand on propose une globalisation, c'est très bien, mais cela entraîne tellement de paramètres différents, etc. que cela devient intenable.

Si l'on reste sur des entités limitées que sont les régions, ça reste à taille humaine. J'espère que ce sera la voie que l'on finira par prendre.

Arthur-Charlemagne, le retour du Roi ? Le retour d'Arthur, c'est évidemment aussi une sorte de Graal. Oui, il doit revenir puisque c'est la prophétie qui oriente tout le cycle arthurien. Arthur ou Charlemagne, là, peu importe. Encore une fois, c'est cette recherche qui est riche.

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  1. La féerie aujourd'hui

 J'ai une théorie sur la féerie, genre mineur qui porte dans son propre langage des thèmes majeurs, mais témoigne aussi de notre traçabilité ontologique au fil des époques (voir mon site Féeric précité, in La route du Code.)

Je m'explique : les premiers fondements de notre civilisation humaine « récente » datent du Déluge, soit peut-être il y a 4300-5000 ans (ou plus) lorsque les lois noachides s'imposèrent, reflétant la nouvelle alliance conclue entre Dieu et Noé sous le signe de l'Arc-en-Ciel.

Auparavant, le grand chambardement était dû au chaos des forces du « Grand Mélange » issu des engendrements entre les Anges et les filles de la Terre (cf. Livre de la Genèse) ; et aussi ceux entre les animaux et les humains. Le Déluge recouvrit ces mutations comme autant de refoulements dans notre inconscient collectif.

Pour moi, la féerie peuplée de créatures mi-angéliques, mi-animales, mi-humaines, avec la réma-nence de pouvoirs surnaturels, nous ramène à cette lointaine origine. Le fonds celte de TOLKIEN en témoigne, lui-même reflet d'une époque beaucoup plus ancienne, etc.

La Féerie borderait le premier âge de notre ontologie noachide, qui s'épanouira ensuite par les Tables de la Loi, la Torah, puis le Nouveau Testament, et la civilisation judéo-chrétienne occidentale aujourd'hui à son apogée.

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Mais, disons, au bout de 5000 ans les signes de la nouvelle ontologie apparaissent, et pour nous, Harry POTTER en est le signe, et son succès nullement anodin. Qu'est-il en jeu dans l'Ecole des Sorciers de Poudlard ? Rien de moins que l'annonce d'un nouveau monde, dans les relents d'un univers magique disparu, mais toujours présent dans les esprits, qui ne fonctionnera que grâce aux pouvoirs de toutes sortes dans toutes les sphères de la société.

La science et la technologie numérique d'un homme créé à l'image de Dieu accélèrent l'accouchement d'une humanité néo-luciférienne qui va progressivement modifier son âme, et non pas la supprimer, pour survivre.

Si vous appréciez l'importance proportionnelle des mondes de la finance et de l'image dans nos vies, vous imaginez ce qui nous attend. Il y a 1000 ans déjà la prophétie de Jean de Jérusalem annonçait l'émergence d'un monde virtuel plus réel que la réalité elle-même pour notre époque.

C'est le retour en force de Babel et du Livre d'Enoch. Il y a des lumières qui aveuglent...

En grossissant outrageusement, je dirais que la féerie représente elliptiquement l'alpha et l'oméga de notre ontologie et de notre civilisation, à condition de rester simplement féerique...bien sûr !

Alors, comme nous disions en introduction, ton chemin de vie est lié à L'Arche de Noé, donc à la féerie. Nous attendons impatiemment ton avis autorisé sur le sujet.

En Ardenne, tu nous apprends aussi que cette croyance au Loup-Garou, symbole du pacte ancien avec la Nature, repose aussi sur une réalité médicale. (in Les êtres fantastiques de la forêt ardennaise (opus précité.) La féerie dans la chair ardennaise ?

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- A.M : Le Déluge existe dans différentes civilisations, même chez les Amérindiens, un Déluge d'eau ou de feu, marquant le départ du monde suivant.

Je ne sais pas si la féerie tient de ce souvenir-là, mais les Latins ont exprimé « l'Age d'Or » qui est resté un souvenir, peut-être imaginaire, dans une large partie de la population, ce qui d'ailleurs se traduit au quotidien par des expressions comme « au bon vieux temps. »

Ce n'est pas impossible que le renouveau nécessaire du train de vie actuel de l'humanité doive déboucher sur quelque chose de nouveau. Il n'y a jamais eu autant de mutations dans la vie en général qu'à notre époque. On doit se reconstruire quelque chose de neuf, et adapté aux nouvelles conditions de vie.

Dans ce cas, la féerie, le fantastique sont des vecteurs privilégiés permettant d'imaginer des pistes nouvelles.

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Pour conclure, quel regard portes-tu sur l'expression féerique aujourd'hui ? Osons-le dire, le meilleur coexiste avec le médiocre.

Ne faut-il pas rappeler que la création, le renouvellement de ce genre bien-aimé, concerne aussi le fond, et non pas que l'expression visuelle exacerbée ?

- A.M : La féerie doit évidemment comporter une partie de rêve, mais ne doit pas non plus s'écarter trop de la réalité. Parce que sinon, on se retrouve complètement décalé, et on n'a plus de prises sur la réalité.

Donc, la féerie, et en particulier la féerie initiatique, comme certains Contes célèbres (PERRAULT, Lewis CARROLL, dans le chemin d'Alice, la jeune fille devenant femme, etc.), doit aussi indiquer le chemin de la réalité ?

- A. M : Oui, je le pense. Il faut cette dimension féerique, mais restant rattachée à la réalité humaine, à sa recherche permanente. Sinon, c'est une vanité qui tourne sur elle-même.

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A terme, féerie rimera avec écologie. Le rêve avec la réalité ? Par exemple, Féeric avec Féerique.

- A.M : Oui, ce serait assez naturel.

Merci à toi, l'Epervier (moucheté).

 

Propos recueillis à Theux par © Eric LE NOUVEL

Ce 29/3/13

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