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EDITORIAL N°9 - OCTOBRE 2019

L’ART DU DIALOGUE AVEC L’INCONSCIENT SELON JODOROWSKY

JODO

 

Face au Déluge de la société numérique, avons-nous encore le temps, le désir ou le savoir de gérer notre inconscient ? Le Grand Calculateur et autres systèmes le font pour nous, et tant que nos existences fonctionnent, tout va.

Au moment des crises, les intervenants efficaces ne sont pas si nombreux que cela. Les urgences craquent sous le poids de semi-malades qui mériteraient que l’on prenne le temps de s’occuper d’eux. A défaut, il reste les médicaments.

Dans un contexte plus serein, il est bon de connaître la loi implacable de l’inconscient agissant de génération en génération dans la nôtre, et via aussi les strates de la sphère collective jungienne.

Quel rapport avec la Féerie, si ce n’est qu’elle serait censée être l’un de ses meilleurs porte-paroles ? Mais aujourd’hui, le compte n’y est pas tout-à-fait à ce titre, dans la littérature ou l’art dit fantastique.

Dans un notre pays irréductiblement gaulois, et soumis à la férule anglo-saxonne dans le domaine de la Fantasy, comme nos ancêtres étaient colonisés par les Romains, le marché de l’offre est soit pléthorique à un certain niveau, soit limité par une absence chronique de demande de masse. Rien ne change.

A cette rentrée, nous avons eu la chance de participer comme invité au Festival des Imaginaires de Ravières (89), du 13 au 15 septembre, dans cette Bourgogne qui nous tient tant à coeur. Bravo à cet évènement si sympathique et convivial, merci à Delphine GOUMAZ et à son équipe ayant réussi la performance de réunir 70 intervenants. L’âme de cette région viticole et alchimique sait entretenir sa force de vivre.

 

Ravières

 

A la belle église de Saint-Pantaléon du village, l’exposition des arts visionnaires y étaient particulièrement réussie entre l’art et le sacré. Onze artistes (Dominique DESORGES, Michael THOMAZO, Juan Carlos CARRILLO…), et bien d’autres, ici et ailleurs, résonnaient à l’unisson. Mais, malgré leurs réussites esthétiques indiscutables, je n’y trouvais pas la logique du fil conducteur, l’intention, présente et lisible par ailleurs dans les archétypes chrétiens connus du lieu.

Quant au Salon du Livre, à l’offre démesurée par rapport à la zone de chalandise rurale des clients de la région, il témoignait de la mutation critique de ce secteur. De plus en plus de créativité et d’auteurs, et de moins en moins de lecteurs possibles. Une surabondance d’images sur un fond contrasté.

Bien sûr, les exceptions ne manquent pas, mais la tendance est là. Certains s’en tirent bien et tant mieux. L’expression de l’Imaginaire oscille entre le règne de la quantité et l’espoir de sa qualité. Une belle niche ou un jour une pépite ?

Je reste persuadé du créneau possible de salons plus ciblés et interactifs avec un public choisi, prêt à en payer le juste prix. Pourquoi ne pas essayer un certain style de festival de Magie ?

 

ISSY

 

La Fantasy se manifeste même dans notre ville d’Issy-les-Moulineaux tout ce mois d’Octobre. Il en ressort que l’hégémonie anglo-saxonne démultiplie les vocations d’expression française dans des genres de plus en plus variés en littérature jeunesse et adultes. Qu’on en juge : Light, Dark, Heroic, Fantasy - Fantasy épique - Science Fantasy, etc. Merci à Morgane VASTA pour ses recherches. Mais cette arborescence ne s’arrêtera pas là. Un jour, un auteur pourrait même créer son propre courant…

Mais, qu’est-ce qui cloche éventuellement ? Le catalogue général devient de plus en plus sophistiqué en de multiples variations. C’est génial pour un certain public, l’entertainment des jeux de rôles, le règne du Cosplay, etc. mais on a tendance à s’y perdre, dans ce joyeux bouillon (et parfois brouillon) de culture. Et à part s’amuser ou se projeter dans cette mode, bien utile pour échapper à la sinistrose, on ne discernera pas le but final. Que voulez-vous, tôt ou tard, il faut bien se nourrir culturellement à son niveau. A force de tourner autour du pot, on finit par tourner en rond.

Alors, quand à 90 ans, notre cher Alejandro JODOROWSKY revient avec son dernier film Psychomagie, un art pour guérir, réalisé avec sa nouvelle femme Pascale, et grâce à un financement participatif avec Nour Films, nous sommes aux anges. Nous entendons à nouveau l’incantation de « Zoom back caméra…» lancée à la fin de son magistral film-culte, La montagne sacrée (1973). Que voulez-vous, la forme et le fond y étaient réunis à cette époque.

Et depuis, la condition humaine ne s’est pas simplifiée, produisant encore plus de questions que de réponses dans l’hyperconsommation. Le but de la vie est de vivre, et non pas rêver, équilibrer l’imaginaire, voire l’idolâtrie, par la loi. Les deux facettes de notre psyché. Et si la Bible a été longtemps le Livre pour l’Occident, c’est qu’elle contient ces fondamentaux-là. Avis aux amateurs.

 

Livre

 

JODO, quant à lui, continue sur la lancée de son Cabaret mystique depuis 1980, et son Manuel de Psychomagie (Albin Michel, 2009). L’essentiel est de dialoguer avec son inconscient en lui donnant les outils rationnels d’introspection et d’expression. Certains l’appellent « le dernier surréaliste. »

Né le 17/2/29, ce chilien d’origine ashkénaze ukrainienne, vit le programme de l’Ange MANAKEL - Connaissance / 66 dans le Sentier Sephirotique : Yesod - Tiphereth - Binah. Soit trouver la balance progressive entre les forces de l’inconscient et de la sexualité, le dévoilement de l’individualité (moi supérieur), et l’influx de l’inspiration.

Le Texte traditionnel (Kabaleb) nous informe qu’il reçoit « le pouvoir régénérateur d’apaiser la colère divine, là où elle se manifestera, particulièrement dans les maladies. » Ce don de guérison « favorise l’action de toutes les thérapies ou tous types de relations basées sur le contact physique. » (Virya). Il s’accompagne du discernement entre le mal et le bien, entre l’inaccompli et l’accompli.

De plus, sa Paracha Tetsavé (Exode) - « Ordonne » contient les attributions sacerdotales du Temple, soit le service rendu au Sacré. Vrai, notre JODO universel a fait de son existence un arbre de la connaissance dans l’expression artistique, du profane au sacré, et au bénéfice d’autrui.

Je l'ai connu recevant chez lui des visiteurs pour écouter ses commentaires de la Bible. Il est écrit dans celle hébraïque de Samuel CAHEN (Les Belles Lettres 1994), cf. l’Introduction de Marc-Alain OUAKNIN (p.77) : « Je tiens à remercier tout particulièrement M. Alejandro JODOROWSKI, qui a eu la générosité et la gentillesse de m’offrir les 18 volumes de la Bible de S. Cahen dans l’édition de 1830. (…) » Vrai, ce personnage, qui est Mensch (terme yiddish pour exprimer l’honnête homme, l’homme d’esprit), a sûrement des rabbins dans ses ancêtres.

 

Bible copie

(La 1° Lettre de la Torah / Tanakh est le Beith ב de BERESHIT. La dernière Lettre de la Torah / Tanakh est le Lamed ל du nom Israël. Soit Beith-Lamed בל sur cette couverture.
Mais lues à l'envers, soit Lamed - Beith  לב , Lev = le coeur. C'est en ouvrant son coeur que l'on entre dans la Torah.)

 

En quoi sa psychomagie est-elle salvatrice ? C’est en-bas que cela se passe, dans l’Intime enfoui dans le corps, et non pas en-haut. Son film-synthèse est un ensemble de tableaux de passages à l’acte de guérison réussis, par l’engagement total du malade et de son thérapeute.

Pour se faire, en décryptant l’inconscient transgénérationnel, il a fallut identifier les racines de la problématique, définir une stratégie par une mise en scène de passage sans retour, parfois hors-norme, entre l’instinct de vie et de mort.

Telle cette femme sud-américaine, dont le compagnon parachutiste s’était suicidé sous ses yeux, s’est libérée de son enfermement des années plus tard, en sautant à son tour accompagnée en parachute, etc. Ou ce couple névrosé par le manque de l’enfance, déambulant boulevard Saint-Germain aves des chaînes aux pieds, marquant sa détermination à les faire partir. Etc, etc. Un vrai régal libérateur.

Tout le reste est le grand art d’un grand-maître accompli dans la tradition renouvelée et de son équipe au service de la vie.

 

labyrinth svg

 (Wikipédia)

Et nous là-dedans ? Notre société manque cruellement d’interprètes de l’inconscient et passeurs de ce niveau. Nous avons déjà salué sur notre site la contribution de François VIGOUROUX (in La Route du Code). Nous sommes encombrés de thérapeutes sans vrai statut social reconnu, où les prétentions de l’énergétique favorisent le résultat immédiat en oubliant les principes, les causes des conséquences, et encore moins l’accès à la cause des causes que permet la Kabbale.

Quant à l’Imaginaire, à la Fantasy de tous bords, à la Féerie, etc. il ne suffit plus de nous faire rêver, ou de nous indiquer des voies initiatiques virtuelles. Cela se bouscule au portillon, mais qu’est-ce qu’il y a derrière ? Les Contes de GRIMM et de PERRAULT etc. comportaient des clés simples à déchiffrer. Bien entendu, les temps changent, comme la civilisation; et les attentes aussi.

En final, qui êtes-vous, comment sera votre devenir, et dans quels mondes voulez-vous, voudrez-vous vivre ? Dans le vôtre, c’est sûr ! On a presque la liberté du choix aujourd’hui, mais attention aux lendemains.

Cause toujours, Papy…qui vivra verra !

 

 Couverture copie

 

Démarré en 2014, mis en ligne en 2012, Féeric les Lieux magiques, le messager de l’inconscient des lieux, sera publié dans un premier tome en décembre prochain. Une autre étape du chemin.

Nous ferons l’annonce sur facebook en temps voulu, et vous pourrez passer commande pour être livré juste avant Noël, si vous le souhaitez.



Bonne rentrée.

 

© Eric LE NOUVEL

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